Barry, la quarantaine, new-yorkais à la tête d’un fonds d’investissement, prend la fuite suite à une altercation avec sa femme et la nounou de son fils autiste. Il part en bus Greyhound rejoindre son amour de jeunesse, Layla. Une traversée des États-Unis qui lui apprendra beaucoup de choses, sur lui, sa famille, son pays.

Couverture Lake Success

Il y a quelques semaines, j’ai demandé à un enseignant un conseil de lecture. Je voulais un roman qui m’emporte, j’avais besoin de ressentir ma passion plus que jamais. Il m’a dit avoir beaucoup apprécié Lake Success. Il m’en a raconté les grandes lignes et m’a totalement convaincue. J’ai donc commandé ledit livre, et l’ai commencé quelques jours plus tard.

Barry Cohen, homme aux 2,4 milliards de dollars d’actifs sous gestion, entra d’un pas chancelant dans la gare routière de Port Authority. Il était visiblement ivre et saignait. Il y avait une incision nette au-dessus de son sourcil gauche, où l’ongle de la nounou l’avait coupé, et, stigmate de sa femme, une égratignure en forme de larme sous son œil. Il était 3h20 du matin.

C’est ainsi que le lecteur fait connaissance avec Barry Cohen. Son argent, ses réussites le mettent en valeur. C’est un peu ce qui compte pour lui. Ça et sa vision de la famille idéale, avec trois enfants, ayant chacun, dans la salle de bains, une vasque, pour qu’ils puissent se brosser les dents tous en même temps et s’arroser. Mais pour le moment, il n’y a que lui, sa femme indienne, Seema, et son fils, Shiva, accompagné de sa nounou. Shiva est autiste, ne parle pas, ne regarde pas ses parents. En voulant avoir un contact avec son fils, Barry a une altercation avec sa femme et la nounou, et décide de fuir.

Mais pas pour rien. Non, ce qu’il souhaite, c’est retrouver Layla, son amour de jeunesse. Et le chemin ne sera pas si facile.

Barry m’a d’abord paru détestable. Ses réflexions me gênaient parfois ; j’ai dû lever les yeux au ciel plusieurs fois. Puis j’ai appris à le connaître. À comprendre qu’il enfouissait ses doutes sous une couche de confiance exagérée. Son voyage est l’occasion d’affronter le monde, d’abord en bus Greyhound, où des personnages de tous horizons se côtoient et lui permettent de se remettre en question et de faire de nouvelles expériences.

Le voyage est donc la symbolique de la découverte de soi. Des différences entre Barry et le monde. Il découvre qu’il n’est pas si diamétralement opposé à son fils.

Mais le voyage de Barry n’est pas que cela. Il permet de découvrir les États-Unis, pays riche des origines diverses de ses habitants, très contrasté, avec des villes ayant chacune une identité, composées de quartiers ayant eux aussi leur identité propre. Le tout dans une atmosphère de pré-élection, celle de Donald Trump. Un roman social, donc. 

Je n’ai pas forcément compris tous les passages concernant le métier de Barry, les poursuites dont il fait l’objet. Je ne pense pas que ce soit là l’essentiel, bien que l’on touche, il me semble, à des sujets importants pour ce pays.

– Je vais vous demander votre numéro. Et vous pouvez refuser, je comprendrais. Mais si vous acceptez, et si nous venions chaque jour ici, ou ailleurs, nous tenir la main, je serais l’homme le plus heureux qui ait jamais vécu.

De son côté, Seema, la femme de Barry, entretient une liaison avec un écrivain habitant le même immeuble. D’ailleurs, les chapitres alternent entre la vie de Seema et celle de Barry suite au départ de ce dernier. J’ai beaucoup aimé le personnage de Seema, prise entre ses désirs (il faut dire que la sexualité et l’amour, et ce qui tourne autour, prennent une certaine place dans le roman, sans que celle-ci soit centrale), ses « devoirs » de maman, particulièrement de maman d’un enfant autiste et toutes les questions que cela engendre, son rapport à sa famille et ses origines.

C’est un roman habilement mené, sérieux mais teinté d’humour et surtout, très sincère et humain. Tous les personnages sont imparfaits et correspondent à la réalité. Les événements s’enchaînent, tout comme les rencontres, et tout ne se passe pas comme prévu ; on pense avoir droit à de gros clichés pour être surpris par la tournure des choses (mon enseignant me l’avait dit, et il avait bien raison !).

J’ai mis un peu de temps à le lire, mais ce roman m’a fait beaucoup de bien. J’aime les livres qui abordent de nombreux thèmes ; j’ai l’impression que tout le monde trouvera quelque chose qui lui parlera. L’histoire m’a bien plu, et m’a surtout permis de me questionner sur moi-même et sur la société, sa complexité, ses contradictions. Et puis j’ai versé une petite larme, ce qui est en général plutôt bon signe !

Une lecture très agréable, dont je suis heureuse d’avoir entendu parler. Je crois que je n’aurais pas spontanément été vers ce livre ; cela me montre à quel point je peux avoir tort parfois lorsque je ne choisis pas certains livres !